Le Festival Histoire et Cité se déroulera du 27 au 31 mars 2019. Pourquoi l’eau s’est-elle placée au cœur de cette 4ème édition ? Réponse avec Sébastien Farré, directeur exécutif de la Maison de l’Histoire à Genève.
Comment est né ce rendez-vous avec l’histoire ?
De la volonté de l’Université de Genève de créer des liens entre la Cité, le public et la recherche académique. Le directeur, Pierre-François Souyri et l’équipe du festival, apprécient et assistent régulièrement au festival d’histoire de Blois, en France. Ce grand rendez-vous connaît un formidable succès et nous inspire depuis le début. La Maison de l’histoire de l’Université de Genève a donc décidé de mettre en œuvre une expérience semblable en 2015. Le principe : organiser de nombreux événements permettant d’associer les regards d’historiens, d’auteurs, de cinéastes, d’artistes, de journalistes… L’idée est de faire vivre l’histoire sous différentes formes et pas uniquement à travers l’université ou les manuels scolaires.
Cette année, l’eau est en fil rouge…
L’objectif de nos thématiques annuelles est de discuter des enjeux d’actualité à partir du passé. Cette démarche nous permet d’expliquer qui nous sommes, de comprendre notre présent et d’imaginer l’avenir. L’une des actualités prégnantes de ces dernières années touche au climat, à la pollution. L’eau est un sujet parallèle directement connecté aux enjeux climatiques et qui fait appel à l’imaginaire, aux connaissances historiques. Le thème s’est imposé facilement car l’eau représente à la fois une ressource vitale et précieuse, mais aussi une menace avec les tsunamis, les maladies, les difficultés de la maîtriser, etcétéra.
Nouveauté 2019 : l’offre culturelle se déploie jusqu’en Suisse romande…
C’est une continuité logique à notre démarche initiale : faire sortir la recherche et les historiens des salles de cours pour entrer en contact avec le public, nourrir les débats politiques et sociaux liés à l’actualité. À Lausanne et Sion, nous avons trouvé des partenaires culturels curieux et intéressés avec lesquels nous avons construit un programme parallèle de deux jours et demi, fondé sur le même principe que le Festival Histoire et Cité.
Plongeons dans la programmation. Un film à voir absolument ?
Un jour, le Nil de Youssef Chahine. Tourné sur le grand barrage du Nil en 1968, le film a été censuré par les gouvernements égyptien et soviétique. Cette version restaurée et colorisée dans les années 90 présente des images inédites de la construction du barrage avec notamment, le déplacement du temple d’Abou Simbel. Je conseillerais également Léviathan, une œuvre plus expérimentale, réalisée par Lucien Castaing-Taylor et Verena Paravel qui seront présents au festival. Consacré à la pêche intensive, le documentaire a été tourné avec un dispositif technique inédit : des caméras fixées sur la coque des bateaux nous immergent dans la réalité des grands filets, des conséquences dramatiques de cette activité, de la destruction des océans…
L’idée est de faire vivre l’histoire sous différentes formes et pas uniquement à travers l’université ou les manuels scolaires
Une conférence ?
Je mettrais en lumière notre soirée d’ouverture : un débat sur les enjeux du climat et de l’environnement qui s’appelle La planète prend l’eau présenté par le journaliste Alexis Favre et en présence de Dominique Bourg, Audrey Pulvar et François Jarrige.
Une visite guidée ?
Nous en avons plusieurs. Parmi celles-ci, ArchéEaulogie sera menée par des archéologues au fil d’une exposition thématique rassemblant des objets de l’Antiquité liés à la gestion de l’eau : aqueducs, transports, fontaines. L’animation permettra de comprendre en quoi l’eau a représenté une ressource essentielle dans le développement urbain de la période antique.
Une rencontre ?
L’une d’entre elles se tiendra avec Erik Orsenna, auteur de plusieurs essais dont un consacré aux enjeux de la mondialisation et de l’eau. Autour d’un café philosophique aux Bains des Pâquis, l’Académicien débattra avec Gilles Mulhauser - directeur général des Eaux de Genève - sur le thème de l’eau et des grands fleuves en particulier. Une autre rencontre se fera avec Peter Frankopan, un historien anglais qui s’exprime parfaitement en français. Son ouvrage Les routes de la soie s’est vendu à un million d’exemplaires.
Une animation inclassable ?
Nous proposons Écoute littéraire, un projet un peu différent qui se déroulera aux Bains des Pâquis : l’artiste genevoise Julie Gilbert a écrit et recueilli plusieurs textes évoquant l’imaginaire de l’eau. Le public pourra les écouter en empruntant des casques audio et en profitant des vues du bord du lac. À noter également que, pour la première fois, nous accueillerons des ateliers pour enfants dont un dédié à l’histoire du jet d’eau, préparé par Anita Lehmann auteure d’ouvrages pour enfants.
Propos recueillis par Nathalie Truche
Crédit Photo - Audrey Hansen, Sébastien Farré et Sophie Eckert de l’équipe du Festival Histoire et Cité (2018) © Cyril Perregaux