Un homme seul rentre dans son appartement et pose ses clefs sur un meuble - Les scènes s’enchaînent ensuite mettant l’acteur face à ses choix à chaque tableau : jouer, ne pas jouer, dans quel ordre ?
Aveu ? Récit ? Performance ? Jacques Houssay fouille les méandres de la solitude, s’interroge sur ses fondements et ses effets, une bouleversante traversée en solitaire. Dans son seul en scène, Jacques Houssay nous offre un solo percutant et sincère, faisant la part belle à l’aléatoire.
« J’attends un message. Je sais ça ne se fait pas trop de garder son téléphone allumé quand on est dans une salle de spectacle, encore plus quand on est sur scène mais j’attends un message. Un message qui dirait qu’elle pense à moi. Un message qui dirait que cette tendresse qu’on attend dans la nuit et qui ne vient jamais a fini par arriver, que l’amour est possible, que la liberté est possible, que… »
Un texte mordant, écrit avant les confinements, qui nous renvoie à l’humanité fragile qui se joue derrière les murs de nos appartements. L’acteur navigue à vue, improvise, se laisse guider par l’instant présent, la découverte d’un objet ou l’intrusion d’un signe extérieur. Irruption du réel au cœur de cette introspection sensible. La vérité nue du plateau révèle la part d’ange et de monstre présente en chacun de nous, la vulnérabilité comme point commun.
Sur scène, tout est fait à vue, absolument tout : lumières, sons, scénographie, jeu, texte. Le comédien devient explorateur et s’avance dans un long tunnel, profond, étrange, noir parfois. Une descente dans l’âme des êtres, de notre société.
« Une forme légère, affutée pour un spectacle profond faisant le pari de l’intime, sans aucune forme de pathos. Un spectacle en autonomie technique depuis le plateau, révélant l’illusion théâtrale et l’artiste en homme »
Pensées, textes courts qui nous rappelle Edward bond. On est happé. C’est un théâtre d’expérience pour le comédien autant que pour le spectateur. Le texte est brut, sans concession, à l’économie, sans fioritures. Elle vient saisir le spectateur dans ce tragique face à face entre l’homme silencieux reclus dans son appartement et sa solitude qui s’abat comme un coup de poignard.
Les silences sont aussi angoissants que le phrasé haché et brut du texte. On ne sort pas indemne de la représentation.
Dans sa bouche ça se presse, nous on serre les dents (et on lutte avec lui). Seul dans son appartement, seul avec son sexe, son crâne et toute sa chimie interne, seul dans ses entrailles. Il cherche des réponses avant d’exploser.
Jacques Houssay décortique sa solitude et nous entraîne dans la noirceur de notre époque. À voir absolument.