Du 16 au 29 octobre 2024, La Clémence de Titus de Wolfgang Amadeus Mozart sera sur la scène du Grand Théâtre de Genève. Cet opéra, composé en 1791, raconte l'histoire de l'empereur romain Titus, qui a choisit la clémence face aux complots visant à le renverser. Mais cette production promet d'aller bien au-delà d'une simple relecture classique. Sous la direction du célèbre metteur en scène suisse Milo Rau, cet opéra se transforme en une œuvre moderne, bouleversante et engagée.
Milo Rau, une vision contemporaine du pouvoir
Après le succès de Justice, une création marquante présentée la saison dernière au GTG, Milo Rau s'attaque cette fois à Mozart. Dans sa vision, La Clémence de Titus devient une allégorie du pouvoir contemporain, un questionnement sur les élites artistiques et politiques et sur leur déconnexion avec les réalités du peuple. Rau transforme Titus en un artiste célèbre, entouré d'une élite culturelle et politique, enfermée dans sa bulle. Pendant ce temps, à l'extérieur, le peuple endure les tragédies de la vie, une thématique récurrente dans le travail de Milo Rau.
« J'ai choisi de représenter l'élite comme des artistes, car ils vivent de la création nourrie par les malheurs des autres », explique le metteur en scène. Avec son style percutant, il interroge la responsabilité des élites artistiques dans les crises sociales et politiques, offrant ainsi une dimension résolument contemporaine à l'œuvre de Mozart.
Une mise en scène immersive et engagée
Fidèle à son approche documentaire, Milo Rau introduit sur scène des migrants pour incarner le peuple, donnant ainsi une voix à ceux qui sont souvent marginalisés. Cette décision, en phase avec sa volonté de brouiller les frontières entre réalité et fiction, renforce l'impact politique et social de la production. La scénographie signée Anton Lukas ajoute à cette atmosphère dystopique, où les mondes de l'art et de la politique se croisent dans une ambiance apocalyptique. Un message fort se dessine en toile de fond : « l'art, c'est le pouvoir ».
Un casting prestigieux pour un opéra d'exception
Côté musical, cette production réunit un casting de renommée internationale. Le ténor suisse Bernard Richter reprend le rôle de Titus, qu'il avait déjà interprété lors de la diffusion en streaming de 2021. Sa voix puissante et généreuse saura une nouvelle fois captiver le public. Il sera accompagné de la soprano italienne Serena Farnocchia dans le rôle de Vitellia et de la mezzo-soprano Maria Kataeva, qui incarnera Sesto. Cette dernière, étoile montante de la scène lyrique, restera à Genève après La Clémence de Titus pour participer à d'autres projets, notamment la Petite Messe Solennelle de Rossini.
Sous la direction du chef d'orchestre Tomáš Netopil, l'Orchestre de la Suisse Romande interprétera la partition avec une sensibilité qui mettra en valeur toute la profondeur émotionnelle de l’œuvre.
Un opéra entre tradition et modernité
Composée dans l'urgence en 1791 pour célébrer le couronnement de Léopold II en tant que roi de Bohême, La Clémence de Titus est souvent considérée comme un opéra politique. Bien que créé en seulement 18 jours selon certaines sources, Mozart parvient à faire une œuvre intemporelle, avec des airs d'une rare humanité et des ensembles musicaux d'une grande intensité.
Cette nouvelle production genevoise s'annonce comme une fusion réussie entre l'héritage classique de Mozart et la vision radicalement moderne de Milo Rau. En abordant des thèmes comme le pouvoir, la clémence, et les inégalités sociales, elle trouvera sans aucun doute un écho auprès du public d'aujourd'hui. Cette production exceptionnelle promet de faire dialoguer passé et présent, tradition et modernité, en réaffirmant l'universalité et l'actualité des œuvres de Mozart.