Pour l’émission de France Inter « Si tu écoutes, j’annule tout », il interroge les gens de la rue et les met face à leurs contradictions. Dans son spectacle « Que demande le peuple ? », il joue Xavier, un jeune communicant aux dents longues. Guillaume Meurice, un humoriste incisif.
Brossez-nous le portrait de Xavier…
Il est le conseiller en communication de Manuel Valls. Un communicant en tout et n’importe quoi. Capable de vendre des brouettes, du papier toilette ou l’honnêteté d’un candidat. On ne les rencontre pas tous les jours mais les communicants sont bien là : derrière les pubs, derrière les discours des politiques ou des grands patrons. Xavier est un arriviste, un golden boy. Ambitieux, il ferait tout pour être le numéro 1 de sa boite de com’ car pour le moment, il n’en est que le numéro 2. Le spectacle commence à ce moment-là.
Les communicants sont-ils indispensables ?
J’aimerais que non mais ils le sont devenus. Ils contrôlent les images, la parole… Même les réseaux sociaux sont gérés par des community managers. Peut-être qu’un jour, un politique s’exprimera avec un discours direct. Mais pour le moment, ils pratiquent la langue de bois : ce qu’on appelle « éléments de langage » en politique et « slogans » en publicité. Tout ça donne une impression de lisse et contribue à nous immerger dans un monde de communication et non de conviction.
Un slogan qui vous sort par les yeux ?
Le gros truc des communicants c’est l’optimisme béat : « Ne vous inquiétez pas, faites-nous confiance, consommez et ça va bien se passer ». L’horizon des communicants, c’est la consommation. C’est à cette idéologie qu’il faut péter la gueule en priorité, à l’idée qu’on peut acheter du bonheur à la Fnac ou à Auchan.
Au final, que demande le peuple ?
C’est au public de mon spectacle de le dire. Leurs demandes sont ensuite recueillies dans un cahier des doléances. Généralement, les mêmes thématiques reviennent : vacances, travail, argent… Lors d’une représentation à Limoges, le public voulait être débarrassé des « rats taupiers », un petit rongeur qui bouffe les récoltes. Ce qui nous a valu un fou rire mémorable. J’aime bien que le public soit un personnage du spectacle.
Et s’il se dissipe ?
J’ai travaillé près de deux ans dans des cabarets où le public est assez participatif. Le plus difficile à gérer c’est une personne ivre. Hormis ce cas, si quelqu’un commence à faire un peu trop le malin dans la salle, on le calme en une ou deux répliques !
Que pourrait demander le peuple savoyard ?
Leur indépendance ? Rajouter des frontières aux frontières ? J’avais interrogé quelques membres du mouvement pour la Savoie libre lors de ma venue au festival du cinéma d’animation à Annecy. J’en avais fait une séquence pour France Inter. Ils m’en avaient voulu d’avoir un peu tourné leur combat en dérision. Mais bon, c’est le principe de ma chronique.
Qu’aimez-vous dans l’exercice des micros-trottoirs ?
Depuis tout petit, je m’amuse à être taquin, à remettre en question des raisonnements, à trouver des failles dans les logiques. Je faisais la même chose avec les profs. Et je le ferais même si je n’étais pas payé. Mais chut, il ne faut pas le dire à mes patrons ! Ensuite, ça m’amène vers des univers que je n’aurais pas connus autrement : meetings politiques, manif… Ce n’est parfois pas ma zone de confort mais j’aime être confronté à des gens avec lesquels je ne suis pas d’accord. Ça ouvre des perspectives de pensée. Parfois, je suis surpris par des réponses qui me font évoluer dans mes réflexions. C’est hyper enrichissant.
Vos micros-trottoirs : préparés ou improvisés ?
Généralement, je les réalise le matin pour les passer l’après-midi. Souvent, c’est fait à l’arrache. Mais c’est parce que j’aime bien coller à l’actu.
Trouvez-vous toujours des bons clients ?
Je me débrouille pour que mes questions soient suffisamment tordues, à double sens ou absurdes pour que ça fasse la blague. En plus, avec un micro, les gens se lâchent davantage que si ça restait confidentiel.
C’est la chronique de la bêtise humaine ?
Je me moque plus des raisonnements que des gens. Mon but n’est pas de les montrer du doigt. Je préfère pointer les contradictions, les incohérences que nous avons tous, l’hypocrisie entre ce qu’on dit et ce qu’on fait.
Propos recueillis par Nathalie Truche