Paris, Bruxelles, Londres, Bali, Biarritz. Telles sont les différentes destinations et lieux de résidences de Mickaël Eveno, alias Grems. Un parcours géographique aussi riche et dense que la discographie du rappeur parisien, figure du rap alternatif des années 2000, inventeur du deepkho (mélange de rap et de deep house) et graphiste dans sa vie de tous les jours.
Parti de Paris pour l’Ecole des Beaux-Arts de Bordeaux, Michael Eveno s’est fait connaître en créant des flyers et des pochettes de disques tout en peinturant les murs de la ville. C’est à cette époque qu’il commence à utiliser le pseudonyme Grems, faisant référence à sa maigreur.
Marginal, défricheur, touche à tout, graffeur émérite, présent en filigrane dans le rap français depuis plus de quinze ans, héros et catalyseur du rap alternatif, Grems a sorti un album en janvier après cinq ans d’absence à griffonner les brouillons de “Sans Titre 7”, ce qui est peut-être son meilleur album. Salué par la critique spécialisée, cet album est une énième preuve de la capacité de Grems à se réinventer.
Des textes moins bruts de décoffrage, plus rigoureux qui fonctionnent toujours à l’instinct, une sorte de bordel organisé et maîtrisé – sa marque de fabrique – est toujours là. Jazzy dans l’esprit, Grems obéit aux règles du rythme et des rimes, place le son avant le sens, sait rester très technique sans rapper au kilomètre. Il n’a rien à perdre, rien à prouver, n’en a rien à faire de l’écosystème rap, mais se place néenmoins comme un rappeur très actuel, fidèle représentant du rap indépendant.
À son actif, une demi-douzaine d’albums et une dizaine d’EPs, en solo ou avec Hustla, Olympe Mountain, Rouge à Lèvres, Klub Sandwich et PMPDJ. Tant de groupes avec qui il n’a jamais cessé d’expérimenter, pour forger un son métissé bien à lui. Une longue carrière en marge de l’industrie, un lien conflictuel avec les médias et surtout, une démarche artistique singulière, qui dénote du pragmatisme ambiant.
Nul hasard s’il se décrit lui-même comme un OVNI, Greems est un artiste ultra polyvalent : musique, graphisme, tatouage, design, street art, rap, l’artiste est en perpetuelle recherche d’innovation. On retrouve ses œuvres dans le monde entier et même sur les vêtements avec sa marque CAAPS. Grems travaille avec de la bombe acrylique, de l’huile, des marqueurs, des pinceaux, des rouleaux. « J’utilise tout. Je n’ai pas un outil de prédilection. »
L’artiste s’inspire de tout ce qui l’entoure pour créer des œuvres uniques : se référant aux arts premiers dans un style particulièrement coloré et minimaliste mais toujours chargé de références.
Il aime créer avec spontanéité, quel que soit l’outil, le support ou le lieu, la création n’a ni règles ni limites pour ce novateur hyperactif.
« Un artiste c’est forcément quelqu’un qui a une sensibilité et qui est plasticien, qui prend tout ce qu’il a autour de lui pour le rejeter quelque part. »
Si Grems a su expérimenter au sein de la musique, il cherche également à se réinventer perpétuellement à travers ses différents projets professionnels et sa peinture.
Malgré son attachement particulier au graffiti, Grems a su conjuguer sa carrière professionnelle avec des projets graphiques pour des marques telles que Nike, Swatch, Converse ou Philips. Les œuvres de Grems sont visibles partout : des murs de Montréal à Bali, au Centre Pompidou aux campagnes de la RATP jusqu’à la façade du Brise Glace à Annecy !
Symbole d’indépendance absolue et de liberté artistique, Grems reste un modèle pour la génération actuelle, comme en témoigne sa présence marquante sur le titre « Nappeux » de Roméo Elvis, extrait de son dernier album « Morale 2 ».
« À l’époque, Roméo faisait mes premières parties et m’a bien fumé depuis (rires). J’étais content qu’il m’invite sur son album avec Le Motel, d’autant que la prod de Nappeux devait figurer sur mon disque à la base… »
Encore aujourd’hui, l’artiste franco-Belge jouit d’un statut à part et d’une réputation intacte.