Traité de beau gosse pendant toute sa scolarité, l’humoriste n’a pas eu une enfance facile… Le personnage qu’il campe - jadis parfait et modeste - est tombé de son piédestal : ça fait mal et rire en même temps. Fans de second degré, vous allez adorer le nouveau Gérémy Crédeville !
On a l’impression que tout est allé très vite pour vous…
C’est une bonne impression. J’ai fait ma première scène en mars 2010, ça fait donc dix ans. Mais la progression de ces trois dernières années a été assez chouette. Maintenant, il faut que ça dure. Je ne voudrais pas être un feu de paille, qu’il y ait un grand boom et qu’on n’entende plus jamais parler de moi.
Avez-vous une recette pour durer ?
Il faut savoir prendre son temps. Beaucoup ont envie d’être connus ou d’exploser. Je préfère rester dans la tête des gens, être reconnu plutôt que connu. J’aime l’idée que mes vidéos ne soient pas forcément vues par des millions de personnes mais regardées par des gens de qualité et qu’elles génèrent de bons retours.
Quand vous étiez coach sportif, vous rêviez déjà de faire de la scène ?
Non, pas vraiment. Je pratiquais l’impro depuis l’âge de 17 ans. À la fin de l’année, je faisais une représentation devant mes potes. C’était grisant mas je ne pensais pas en faire mon métier. Quand c’est arrivé, j’ai trouvé ça génial. Aujourd’hui, je ne me vois vraiment pas faire autre chose.
Vous faites toujours de l’impro. Vous aimez vous mettre en danger ?
Oui, je me garde toujours cette récréation. Dans mes spectacles, il m’arrive de faire une petite séance si le public semble disposé. Je ne sais plus qui m’a dit un jour « toi, tu es un gladiateur ». En fait, j’agis et je réfléchis après. Il y a dans l’impro une magie inégalable. On vit vraiment l’instant présent, on ne peut pas tricher. Dans mon spectacle, je sais où je vais et en impro, je ne maitrise pas du tout. C’est ça qui m’intéresse. Mais il y a des ficelles, des moyens de toujours se rattraper.
Entre la radio avec Nagui, la télé avec Arthur, le seul en scène… quel exercice vous met le plus à l’aise ?
Il y a des plus et des moins dans chaque discipline. Ce qui est sûr, c’est que je ne veux pas m’accrocher à un seul pan artistique. Si on m’enlève la télé, ça me manquera, la radio aussi et ainsi de suite. Mais de tous, je crois que c’est la scène et le contact avec le public dont je ne pourrais pas me passer.
Est-ce qu’un physique avantageux aide à dire des horreurs ?
Je ne crois pas. Quand on a un physique avantageux, comme vous dites, les gens ont tendance à prendre l’humour comme de la séduction. Et même si on dit des choses horribles, il y a un côté drague que n’ont pas les moches (rire). Lui, on va l’excuser car il est déjà moche. Donc non, ce n’est pas un avantage, au contraire.
Je ne me censure pas, au contraire, je fonce
Et avec élégance, le trash passe mieux ?
Oui, mais il faut veiller à ce que ça ne fasse pas prétentieux. L’équilibre est ténu. Il faut vraiment mettre les bons mots aux bons endroits. C’est sûr que l’élégance, une phrase bien tournée, une formule intelligente passe mieux, même si le fond n’est pas glorieux. La forme a vraiment toute son importance.
Mais le public aime vos personnages arrogants…
Ce personnage prétentieux a son public et cadrait au spectacle qui s’appelait Parfait et modeste. Aujourd’hui, je montre davantage les fragilités du personnage que j’ai joué pendant sept ans. Le spectacle en rodage s’appelle Bientôt et le nouveau spectacle s’appellera Enfin. Il dévoilera qui je suis vraiment, qui se cachait derrière le gars qui se la pétait tout le temps et dont l’arrogance était en fait une carapace.
Le vrai « vous » sera quand même drôle ?
Oui, bien sûr ! La loose fait rire. Il y a un côté jubilatoire à voir quelqu’un se prendre les pieds dans le tapis. Montrer que ce personnage autrefois prétentieux a plein de faille, qu’il va d’échec en échec, est encore plus drôle. Et ça le rend aussi plus attachant.
Il y a des thèmes que vous n’abordez pas dans vos spectacles ?
L’actu et la politique ne m’attirent pas car elles ne m’amusent pas. Et ces domaines sont tellement changeants qu’ils sont vite dépassés. En tout cas, je ne me censure pas, au contraire, je fonce. Et aux gens qui ne comprennent pas le second degré, qui n’ont pas suffisamment de recul pour l’apprécier, j’ai envie de dire : tant pis pour eux.
En quoi un festival diffère d’un seul en scène ?
Le public n’est pas forcément là pour nous, il y a donc des âmes à conquérir. Et ceux qui nous connaissent sont heureux de nous retrouver. Il faut donc jouer sur les deux tableaux : convertir le public qui nous découvre et garder celui qui nous aime déjà. Et surtout, le surprendre !
Propos recueillis par Nathalie Truche