Du 15 avr. au 11 mai 2025
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Fanny, l'illustratrice derrière le projet « Illu à la Cool », puise son inspiration dans la beauté du quotidien et de la nature. À travers ses œuvres peuplées de petites créatures agenres, à la fois douces et un peu étranges, elle explore des thèmes de bienveillance, d'individualité et de liberté d'expression. On retrouve ces personnages uniques, porteurs de messages positifs, en couverture de cette nouvelle édition de MokaMag. Retrouvez l'artiste cet été à « Un été à la Rayonne », à Villeurbanne, en juillet, où elle partagera son univers avec le public. Rencontre.
Crédit photo : Retrofun © Illu à la cool
Crédit photo : Maniques © Illu à la cool
Peux-tu te présenter et nous parler de ton parcours ainsi que de ton travail actuel ?
Je ne voudrais pas en faire tout un roman mais...
• Chapitre 1 - L’enfance
Ma vie se résume, depuis 1998, à deux choses : les animaux et l’expression artistique.
Le dessin est venu à moi très tôt, à cause des chevaux. Avant même de pouvoir les côtoyer, je passais mes journées à les dessiner. Au collège, j'étais un peu la « folle aux chevaux », mais mes capacités en dessin me permettaient de rattraper le coup auprès de mes camarades, afin de ne pas être complètement ostracisée. Finalement, le cheval m’a sauvée de moi-même, et le dessin m’a sauvée des autres.
• Chapitre 2 - Le diplôme
Jusqu’au lycée, je pensais travailler dans le milieu équestre. J'avais mon galop 7 et ma propre jument. Mais un enchaînement de petites choses a bousculé mes plans. Je dirais même que le destin m’a forcé la main, mais sûrement pour le mieux, car je suis bien plus douée pour dessiner que pour tout autre chose sur cette terre. Je suis donc entrée à l'Epsaa en prépa publique, puis j’ai suivi leur cursus menant à un diplôme de Directeur artistique de niveau master en seulement trois ans.
• Chapitre 3 - Le timing
Je suis diplômée en plein Covid. En même temps, l’instabilité générale a gelé les embauches dans mon domaine. Encore une fois, la vie m’a donné un coup de main. Avec du recul, continuer dans cette voie toute tracée – être une « vache à idées » dans une agence de branding parisienne – m’aurait rendue malheureuse. J’ai donc eu cette chance, ce temps précieux pour développer mon style illustratif. Cela m’a permis de décrocher des commandes professionnelles via Instagram et de vendre des illustrations sur des marchés parisiens (événements qui se multipliaient à cette époque). C’était le début de ma carrière d’illustratrice, ahah.
Crédit photo : Le Phare © Illu à la cool
Crédit photo : Carte Postale © Illu à la cool
D'où vient le nom « Illu à la cool » ?
Très bonne question. Au départ, je dessinais des petits personnages absurdes sur ma table de classe que je partageais avec Sophie, ma meilleure amie à l'Epsaa. Moi, je ne les aimais pas plus que ça, mais Sophie était un bon public. J’ai commencé à poster ces gribouillis, vraiment bâclés, en 2019 sur Instagram. C’étaient des dessins « à la cool », réalisés sans prise de tête, en 30 secondes au Posca. Pour les rendre plus digestes sur internet, je les prenais en photo, puis je les importais pour les vectoriser sur Illustrator, avant de les colorier au pot de peinture (virtuel), avec des palettes RVB bien vives. À cette époque, j'étais en deuxième année d'études. Je postais de manière anonyme, seule ma meilleure amie savait que c’était moi. Et ça me plaisait. Mon seul objectif était de faire des dessins un peu drôles avec un style très marqué, différent de ce que j'avais l'habitude de faire. Ce n'était ni esthétique ni trendy. Le fond et la spontanéité m'importaient plus que la forme.
Comment décrirais-tu ton univers artistique ?
Absurde, sympathique, drôle, nostalgique, universel, coloré, vibrant.
Où puises-tu ton inspiration pour réaliser tes dessins ?
Les dessins animés, les films, les relations humaines, les interactions sociales, des choses que je vois partout : dans la rue, dans la vie, dans ma tête. Les choses que j’aimerais avoir, celles que j’idéalise, celles qui me lient au vivant, ma ville, mes amis, la nature.
Crédit photo : pétanque cauchemardesque © Illu à la cool
Qui sont ces personnages étranges et colorés qui peuplent tes dessins ? Quel message ou sentiment souhaites-tu transmettre à travers eux ?
Mes personnages sont à mon image : ils ont un long nez, un torse lisse, et sont complètement androgynes. Même si j’ai beaucoup de cheveux, eux n’en ont pas, par souci d’universalité. Pas de cheveux = pas de lutte, pas de classe sociale, pas de situation géographique, pas de culture. Plus sérieusement, je les ai dessinés comme je vois les humains : tous pareils, indifféremment de leurs histoires, de leurs genres ou de leur ADN. Quelques changements mineurs, des couleurs, des formes peuvent varier, mais rien qui les rende vraiment opposés les uns aux autres. Et comme j’idéalise, j’aspire à les voir tous épanouis et bienveillants.
Peux-tu nous parler de ton processus créatif ? Comment travailles-tu au quotidien, du croquis à la version finale de tes œuvres ?
J’ai toujours été une adepte des carnets pour gribouiller mes idées de façon rapide et précise. Quand je dessine par plaisir, sans contrainte de commande, je me laisse porter. Je me raconte une histoire et je dessine tout ce qui me vient à l’esprit. Je ne jette rien ; si ça ne me plaît pas, je laisse de côté et j’y reviendrai plus tard. Je suis donc toujours dans une dynamique de création sans pression, que ce soit sur papier ou sur tablette, avec ou sans référence, avec ou sans intention.
Crédit photo : ONE © Illu à la cool
En accumulant tout ça, je crée une grande banque d’idées et de mises en scène dont je me sers pour mes projets professionnels. Cela me permet d’être efficace et rapide lors de mes commandes.
Lorsqu’il s’agit de créer un nouveau personnage, par exemple, le processus prend plus de temps. J'y pense partout : dès que je m'ennuie, dans la voiture, sur le vélo, sous la douche, etc. C’est le processus qui me prend le plus de temps, mais c’est aussi celui qui est le plus gratifiant lorsque je trouve ce que je cherche.
Peux-tu nous parler de ta collaboration avec La Rayonne - tiers lieu culturel à Lyon. Tu as réalisé l’affiche de leur saison culturelle, quel a été ton approche pour ce projet ?
La Rayonne a été une superbe opportunité pour moi. C’était une commande qui touchait exactement mes centres d’intérêt : les arts, la société, le vivre ensemble et la nature. J’ai travaillé comme d’habitude, de manière très intuitive. J’ai pris mon pinceau et mon encre de Chine et j’ai dessiné mes personnages, heureux, en interaction les uns avec les autres.
Tes illustrations ont souvent une dimension visuelle douce, mais aussi un côté onirique. Souhaiterais-tu que tes œuvres puissent avoir un impact sur la manière dont les gens perçoivent la nature et la diversité ?
C’est exactement ça. Je ne l’avais pas conscientisé au début, mais je donne mon avis sur la vie. J’aimerais apporter un peu de réconfort. Dans chacune de mes images, j’espère apporter un peu plus de joie, de rire, de nostalgie et de bienveillance. Une plus belle place pour la nature, une plus belle place pour les animaux (nous compris). Des études ont montré une diminution de la couleur dans nos environnements depuis plusieurs décennies. En tant que créatrice d’image et graphiste, je milite contre ça. Je propose des designs très colorés pour améliorer, à mon échelle, nos quotidiens.
Quels sont tes projets futurs, ou des collaborations à venir que tu aimerais partager avec nous ?
Je prépare actuellement une grosse exposition solo à Chromatique (51 rue Saint-Michel, Lyon 69007). L’histoire raconte la rencontre entre deux individus venus de deux planètes différentes. Le vernissage aura lieu le 10 avril et l'exposition sera visible pendant un mois !
Propos recueillis par Carole Cailloux
