Dans le bâtiment de verre qui s’érige sur le site des Marquisats à Annecy, l’équipage navigue sur un équilibre savamment dosé entre les groupes émergents et les valeurs confirmées. Levons le voile avec Bertrand Furic, directeur du Brise Glace.
Comment fonctionne le navire ?
C’est d’abord un lieu qui a été voulu par la municipalité. Mais dès le début, les élus n’ont pas imaginé qu’il puisse être en gestion directe municipale et ont initié un fonctionnement en mode associatif. De cette volonté a été créée Musiques Amplifiées, une association de loi 1901 qui s’appuie sur des adhérents et de droit.
Quel cap suit le Brise Glace ?
Un des choix était d’accomplir un vrai travail d’accompagnement de pratiques musicales largement amateures. Mais nous ne sommes pas un garage à musique où l’on se contenterait d’ouvrir et de fermer les portes. Vu l’amplitude horaire d’ouverture de nos locaux de répétition, nous avons cinq régisseurs à temps plein.
Comment se manœuvre une programmation ?
J’ai toujours essayé de mettre trois ingrédients dans la recette. Le premier est la dimension territoriale. Nous portons ainsi une attention particulière à la scène locale, mais aussi aux groupes régionaux et nationaux en voie de professionnalisation et que l’on veut mettre en lumière. Une présence internationale est également indispensable. Nous nous efforçons de proposer un tiers de groupes locaux, un tiers de nationaux et un dernier tiers d’internationaux. Le deuxième ingrédient est esthétique. Quand, dans un rayon de 50 kilomètres, il n’y a pas d’autres salles, nous avons une obligation de représenter la diversité musicale qui existe sur le territoire, que ce soit du metal hardcore, du jazz, du rock, du reggae ou de l’électro. Le troisième ingrédient est économique. Si notre mission première est la découverte, il faut trouver un moyen d’équilibrer la prise de risque avec le prix des plateaux. Chaque trimestre, nous avons besoin de privilégier une ou deux dates avec des têtes d’affiche qui sont forcément un peu plus chères. Parallèlement, nous prenons des paris sur des esthétiques rares, plus pointues.
Le Brise Glace aura 20 ans en 2018. Encore jeune mousse ou déjà capitaine ?
Il lui reste des axes de progression, c’est incontestable. Le bâtiment, qui était très adapté à sa création, manque peut-être de modularité. Nous pourrions par exemple imaginer de placer des musiciens au milieu de la salle. Des enjeux existent aussi au niveau de la projection vidéo pour enregistrer les concerts et les retransmettre sur le web. Nous pourrions également partir à la conquête du jeune public qui est peut-être un peu plus consommateur et moins dans la découverte. Le paysage musical évolue, il faut rester en veille sur ce qui se fait dans les domaines du metal, de l’électro, et cetera...
Que voyez-vous à l’horizon 2020 ?
J’espère que nous réussirons à garder l’équilibre des trois tiers. Cela n’est pas facile car les artistes internationaux ont des plannings serrés avec 3 à 4 dates maximum en France. Nous devons maintenir une notoriété, un matériel technique, pour que ces artistes pensent à s’arrêter à Annecy. Le gros enjeu : qu’on arrive à être plus visible sur la carte européenne. Par exemple, qu’entre leurs dates en Suisse et en Italie, ces têtes d’affiche passent par le Brise Glace.
Un concert qui promet de nous faire chavirer ?
Notre travail est de proposer des concerts en partenariat et ne pas rester seul dans notre tour d’ivoire. Ainsi, le 5 novembre, l’équipe qui organise le Birthday Festival nous amène Etienne de Crécy, grand nom de la scène électro. En première partie, nous programmons Caspian Pool, un groupe annécien qui commence à faire pas mal de bruit au niveau national. Autre événement important à évoquer : la troisième et dernière année du volet d’échange interculturel avec Cuba et Radio France International. Dans ce cadre, nous accueillerons Roly Berrio le 8 décembre et Neeskens, un groupe installé à Annecy. Cela illustre parfaitement notre souhait d’avoir des têtes d’affiche et, en complément, des premières parties locales.
Propos recueillis par Nathalie Truche