L’artiste de 85 ans Benjamin Vautier, alias BEN, s’est fait connaître grâce à ses « écritures blanches sur fond noir ». Figure artistique majeure de la seconde moitié du 20ème siècle, il expose à La Conciergerie à la Motte Servelex (73) jusqu’au 18 décembre.
S’il y a un bien une personnalité artistique qui a interrogé la place de l’artiste dans la société, et a confronté son ego c’est bien Ben. Il est l’exemple-même de l’artiste qui doute, s’interroge et se pose des questions de fond : « Que suis-je ? Je doute de l’art ? Peut-on penser à rien ? Qui décide de ce qui est beau ? » Il y répond au travers d’œuvres très personnelles qui découlent de ces questionnements.
C’est en 1953 que Ben écrit son destin. « Il faut manger, il faut dormir », avec cette paraphrase simple et évidente, il crée sa première « écriture ». Pour mieux parler et questionner l’art, il décide de l’écrire, de le mettre en lettres et de faire de l’écriture un art visuel. Il amorce de cette façon un premier pas vers l’art conceptuel qui ne s’est pas encore développé.
En 1976, dans sa série intitulée Introspection, Ben conçoit une approche philosophique du questionnement, ses réponses sont parfois naïves, mais elles révèlent un conflit intérieur qu’il a le courage d’affronter : « Pourquoi le doute ? Mais parce que l’art, ce ne sont que des questions. Pourquoi peindre ? Pour la gloire. Pourquoi la gloire ? Pour emmerder les autres. Pourquoi ? Pour exister. Pourquoi vouloir exister ? Pour ne pas mourir… Je suis en questionnement perpétuel. La matière avec laquelle je travaille, ce sont des doutes. » confie-t-il.
Il interroge le concept d’égo, du moi, mais aussi sur l’idée d’appropriation. « Ce sont des notions fortes qui bousculent les codes de l’art » raconte l’artiste. Au niveau du marché d’art, Ben souligne le poids de la signature aujourd’hui, devenue parfois plus importante que l’œuvre elle-même. La pensée de l’appropriation va faire l’objet de ses recherches. Il intègre entre temps le groupe Fluxus, qui se considère comme un non-mouvement artistique qui questionne le statut de l’artiste et de l’œuvre d’art dans la société. Ses punchlines écrites à la main, en lettres blanches sur fond noir vont alors résonner comme de véritables slogans. Ben multiplie les produits dérivés et les éditions portant sa griffe à base de trousses, de sacs et d’agendas pour les étudiants. Il parvient alors à inscrire son art à la fois dans une dimension conceptuelle tout en le mettant à portée de main pour chacun.