#05
Du 1 mars au 15 avr. 2025
Au-delà du rideau
Que se passe-t-il après un concert ? Après la dernière note, le dernier acte, la dernière danse, lorsque le rideau est tombé, une fois l'écho des applaudissements dissipé et que le public a quitté la salle ? Je pense souvent à ce vide, celui qui s’installe une fois la scène désertée, lorsqu'on est pris entre la fin du spectacle et le retour à la réalité.
Récemment, j’ai pensé à 2 de mes amis qui traversent des périodes charnières dans leur vie : l'un, après 10 ans dans une entreprise, vient de perdre son travail ; l'autre, après 10 ans de couple, vient de s’installer dans un nouvel appartement. Les deux sont plongés dans ce vide qui suit la fin d’un chapitre, dans cet « entre-deux » où l’identité vacille… Mais au-delà de la tristesse et de la nécessité de ce changement, une question se pose : qui sommes-nous une fois les rôles, les titres et les obligations dissipés ? Que devient-on lorsqu’on cesse de nous définir ? Que reste-t-il de nous une fois le décor démonté et les costumes pliés ? C’est, peut-être là, dans cette situation, ce chaos, ce vide, que l’on trouve une forme de liberté. À chaque fois que nous quittons la scène, nous nous retrouvons un peu nous-mêmes.
Dans le milieu culturel, cette question a une résonance particulière. Après l'intensité d’un concert ou d’un spectacle, le silence qui suit est souvent palpable. Les artistes savent que chaque performance est un moment unique, un acte de transformation. Et pourtant, c’est après le spectacle, dans les coulisses, quand le vide s’installe, que l’on trouve la véritable essence de ce qu’on a vécu. C’est là, dans cet « après », que l’œuvre prend sa place et tout son sens dans nos esprits.
C’est peut-être là toute la beauté de l’Art : il nous permet de traverser ces moments de vide. Chaque œuvre s'achève sur un point final qui n'est jamais définitif, mais qui ouvre la porte à l'invisible, à l'inouï. Dans chaque spectacle qui se termine, dans chaque œuvre que l’on décroche, il y a un nouveau souffle et la possibilité de tout recommencer.
Carole Cailloux, directrice de la publication.
